Médiation et procédure contentieuse

Influence de la médiation

sur les délais du recours contentieux

Sauf contentieux particuliers une juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (1) — mais il est tant d’autres délais ! La détermination de leur point de départ et de leur date d’expiration obéit aux règles propres à chaque type de contentieux, règles dont la présentation échappe à la présente épure. Traditionnellement, l’administré, à l’intérieur de ce délai et avant même d’introduire une requête, dispose de diverses actions, par exemple, former un recours administratif. La loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 a ajouté à ces actions le recours à la médiation.
Cette loi, s'agissant des médiations à l'initiative des parties, (c’est à dire avant la saisine du juge, afin de préserver leur droit de saisir ultérieurement ce dernier. C.E. 13 novembre 2023, n°471898), codifiée à l’art. L.213-6 cja édicte en effet que les délais de recours contentieux sont interrompus à compter du jour où, après la survenance d'un différend, les parties conviennent de recourir à la médiation. Ce même article édicte que les prescriptions sont suspendues.
Ces effets ne sont efficaces qu'à la condition que le processus ait été lancé dans le respect de ces délais.

La date à laquelle le processus est lancé est le jour ou les parties conviennent de recourir à la médiation si ce jour peut être établi par un écrit, sinon le jour de la première réunion de médiation (art. L.213-6 cja). À cette date les délais de recours sont interrompus, y compris les délais d’appel.
L’art. R.213-4 cja prévoit que ce délai de recours contentieux, interrompu une fois par la médiation, ne le sera plus par un recours gracieux ou hiérarchique formé postérieurement à la médiation. Ainsi cet article déroge au principe porté par l’art. L.411-2 du code des relations entre le public et l’administration.

S’agissant des médiations régies par ailleurs des dispositions semblables peuvent exister. Par ex. l’art. L.125-12 du Code des communes de la Nouvelle-Calédonie renvoie aux conditions prévues à l'article L. 213-6 du code de justice administrative.

Note 1 : Les plus subtils des lecteurs auront reconnu l’art. R.421-1 cja. Retour

sur l’instruction du dossier contentieux

Pour la présente page le mot « instruction » renvoie à l’instruction du dossier contentieux par le tribunal. La médiation concernée ci-après est donc une médiation entreprise après qu’une requête a été utilement introduite.

Proposée par le juge selon les voies de l’art. L.213-7 cja la médiation n’est pas une mesure d’instruction (C.E. 7 novembre 2019, n°431146). Aussi médiation et instruction suivent chacune leur cours. L'impérium du juge est suspendu, quoique relativement puisque pendant le cours de la médiation le juge, peut encore prendre les mesures d'instruction qui lui paraissent nécessaires (art. R.213-8 cja).

Le médiateur ne prend donc pas le relai du juge, lequel n’est pas dessaisi. La médiation suit son cours indépendamment de la procédure juridictionnelle qui, elle même, suit le sien : il s’agit donc de deux parallèles qui se croisent en certains points ; l’espace du cja n’est pas un espace euclidien.

En effet, l’insertion d’un processus de médiation n’est pas entièrement neutre dans le cours du procès.
  • À l’égard des modes de preuves que les parties peuvent présenter à l’appui de leurs moyens : elles ne peuvent se prévaloir ni des constations du médiateur ni des déclarations exposées dans la bulle de médiation (art. L.213-2 cja), sauf accord des parties, bien évidemment.
  • À l’égard du délibéré : lorsqu’en fin d’audience le juge invite les parties à entreprendre une médiation il différera sa décision au moins jusqu’à l’expiration du délai qu’il leur avait fixé pour réagir (pour un exemple devant le juge des référés : C.E.  Communauté urbaine Le Havre Seine  Métropole, 7 novembre 2019, n° 431146) ou jusqu’à la fin du processus.
    Que le juge ne statue point sur le fond pendant le cours de la médiation est une garantie pour les parties. Cependant cette garantie est limitée dans le temps afin d’éviter l’instrumentalisation de la médiation à des fins dilatoires par l’une ou l’autre.

sur les suites d'un référé suspension

En acceptant la médiation proposée par le tribunal avant l’expiration du délai d'un mois de l’art. R.612-5-2 cja le requérant signifie le maintien de sa requête à fin d’annulation, le tribunal ne peut donc pas prononcer un désistement d’office à l’issue de ce délai : CAA Lyon, 11 octobre 2022, n° 20LY01383.

Urbanisme et référé de l'art.L.600-3 du code de l'urbanisme : la mise en oeuvre, à l'initiative du juge, d'une médiation n'a pas pour effet, ni sur le fondement de l'article L. 213-6 du code de justice administrative, ni sur celui d'aucun principe général du droit, d'interrompre le délai institué par l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme pour la saisine du juge du référé : C.E. 13 novembre 2023, n°471898. Cf. le commentaire très pertinent qu'en fait Mme Elsa Costa.


On ne peut pas dire qu'une question soit bonne avant de l'avoir posée.
Pierre Dumayet, cité par Robert Bober in Par instant la vie n'est pas sûre

Le lecteur restera attentif à la circonstance que ces pages personnelles ne sont que le reflet de ce que leur auteur a cru pouvoir comprendre de la médiation.
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