De l'expertise à la médiation

Il est admis de longue date que le juge administratif peut ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise. En 2010 la mission de l’expert est étendu : il peut concilier les parties. Cependant, en 2016 la conciliation ayant été sortie du champ des modes amiables de règlement des différends le rôle de l’expert s’en est trouvée modifié : l’art. R.621-1 cja, y substitue la médiation.

La médiation est en effet au nombre des modes amiables de règlement des différends (mard) dont le législateur entend développer la pratique. Elle est mise à la disposition du juge administratif par l’art. L.213-1 cja qui l’a définie comme « tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par la juridiction. »

Dans ce cadre le juge de l’expertise peut confier une mission de médiation à l’expert (CAA Marseille, 11 avril 2019, n°18MA00474) ; celui-ci peut au demeurant, de lui même, initier une médiation, sans demander l’autorisation du juge mais avec l’accord des parties (art.R.621-1, 2° phrase cja.) Il lui appartient dans ce dernier cas d’informer le juge qu'une médiation est en cours.

Le respect des principes de la médiation

Dans tous les cas l’expert devenu médiateur doit être attentif à respecter les principes du processus de médiation. L’exposé de ceux-ci excède largement l’épure du présent topo, lequel insiste ici sur deux points déontologiques : Le Conseil d’Etat a rédigé une Charte éthique des médiateurs dans les litiges administratifs qui fixe les principes essentiels garantissant la qualité du médiateur et du processus de médiation engagé dans ce cadre ; il y est précisé que « toute personne désignée comme médiateur par une juridiction administrative s’engage à respecter la présente charte. » (Consulter cette Charte.)
  1. Cette Charte exige notament que le médiateur possède une qualification dans les techniques de médiation: il doit pouvoir justifier d’une formation en médiation ou d’une expérience significative dans ce domaine. Cette exigence s'impose même à l'expert qui entend médier les parties.
  2. Le respect de la confidentialité est un impératif absolu pour le médiateur. Ce principe est énoncé par l’art. L.213-2 cja. Aussi impérieux soit-il ce principe connaît trois exceptions :
  • La confidentialité peut être levée avec l’accord des parties.
  • Elle peut l’être pour des raisons impérieuses d'ordre public ou de motifs liés à la protection de l'intérêt supérieur de l'enfant ou à l'intégrité physique ou psychologique d'une personne.
  • Elle peut être justifiée par les nécessités de la mise en œuvre de l’accord.
  • Une page de ce site expose les principes de la confidentialité.

boule bleue Si la médiation aboutit à un accord l’expert en fait immédiatement rapport au magistrat qui l'a commis. Son rapport, après avoir indiqué les diligences qu'il a effectuées, constate que sa mission est devenue sans objet. L’expert doit alors veiller, en le rédigeant, au respect de la confidentialité ainsi que l’édicte l’art. R.621-1 cja : « Sous réserve des exceptions prévues par l'article L.213-2, l'expert remet son rapport d'expertise sans pouvoir faire état, sauf accord des parties, des constatations et déclarations ayant eu lieu durant la médiation.»
Une cour administrative d’appel estime que peut être y être joint, si les parties ne s'y opposent pas, la transaction qu'elles auront, conclue. (CAA Marseille, 11 avril 2019, n° 18MA00474)
Il y joint sa note de frais et honoraires avec, le cas échant, l’accord des parties quant à leur dévolution.
Encore que s’agissant d’un processus nouvellement instauré il puisse être prudent de se rapprocher du greffe pour connaître la manière de faire de la juridiction.

Si la médiation n’aboutit pas, l’expert reprend ses travaux en vue de répondre aux questions que lui a posé le tribunal.

Hors sujet, mais quand même ...

Dans le cadre de l'instruction d'un référé le juge peut ordonner des expertises "en complément de la médiation" : C.E. 6 août 2020, n°442268

Utilité de l'expertise et possibilité d'une médiation : … si la requérante fait valoir qu'une mesure d'expertise irait " dans le sens d'une médiation entre les parties ", il ne peut être ordonné une mesure d'expertise à cette seule fin, étant précisé qu'il est loisible à  [la requérante] , si elle le juge opportun, de rechercher avec les parties en cause les voies d'une médiation, en application de l'article L. 213-5 du code de justice administrative : CAA Marseille, 25 octobre 2021, 21MA03937


Le lecteur restera attentif à la circonstance que ces pages personnelles ne sont que le reflet de ce que leur auteur a cru pouvoir comprendre de la médiation.
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